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Manou se livre
13 septembre 2012

Le jour du Roi

20408Il en est des livres comme des gens ou des lieux; avec certains on se sent bien, comme chez soi, dès la première approche; d'autres vous laissent distant, amputé de toute compréhension, de tout attachement.

Entre Le Jour du Roi et moi, la rencontre ne s'est pas faite. Peut-être parce que j'avais fait avant la démarche de me renseigner sur l'auteur? Parce que le fait de savoir que ce livre avait reçu le Prix de Flore 2010 me faisait espérer beaucoup? Parce que les critiques sur la toile étaient dithyrambiques? Pourtant, le contexte aurait pu me séduire.

Deux adolescents de quatorze ans, dans le Maroc de Hassan II, en 1987, sont amis. Omar le pauvre et Khalid le riche, malgré leurs différences, ou grâce à elles peut-être, sont inséparables. Ils se nourrissent de leurs expériences, de leurs milieux opposés. "Et il aimait ça Khalid, ma force, mon côté mauvais garçon. Il aimait que je vienne d'un autre monde. Les pauvres. Ca le changeait, disait-il souvent. Il trouvait ça exotique."

C'est Omar le narrateur. Il partage avec nous sa souffrance au fil des pages, son indicible inquiétude, comme une prévision sourde du drame. Sa soif de revanche aussi, et les angoisses de Khalid qui a peur même du soleil...

Dautres personnages secondaires ponctuent encore le récit: le père d'Omar, qui se consume depuis la disparition de sa femme, la mère du héros; personnage absent physiquement mais omniprésent à la fois. Ou de Hadda, bonne noire de la famille de Khalid, qui se révèle à la fin. Hassan II, sur lequel Omar fait des rêves obsédants la nuit, apparaît pareil à une ombre menaçante. Mystérieux et emblématique, sacralisé et craint par les marocains, par nos héros eux-même, la figure du Roi est le fil d'Ariane de Taïa.

Voila pour le décor. Pour le ressenti, j'irai a l'essentiel: je me suis ennuyée, et en plus j'ai été agacée. L'auteur nous présente une vision du Maroc bien manichéenne. Les pauvres contre les riches. Les femmes contre les hommes. Les maîtres contre les serviteurs. L'état contre la magie et les coutumes. Il veut dénoncer des injustices mais le trait est grossier.

J'ai beau ne pas être marocaine et ne pas connaître la réalité de ce pays en 1987 (j'avais un an...) je trouve ça un peu facile. Aucune histoire n'est aussi simple. Les gens ne sont pas fait d'une seule pâte, dit ma mère. Elle a bien raison. Pourtant Taïa nous vend des héros un peu caricaturaux. Qui n'ont comme seule issue pour échapper à leur destin, que la mort ou la fuite. La marge de manœuvre qu'ils ont pour changer leur vie est quasi nulle. Certes, c'est le reflet d'une réalité; certains pays, à certaines périodes de leur histoire, condamnent leurs peuples. Mais peut on écrire cela sans plomber le lecteur? Très franchement, j'ai fini les 20 dernières pages en diagonale. "Récit onirique", ai je lu. Cela dispense donc l'auteur de donner un minimum de crédibilité aux dialogues de ses héros? Et quel interêt de soulever leur badinerie homosexuelle? Taïa a eu le courage de dire publiquement au Maroc qu'il est homosexuel. Mais pourquoi mettre cet élément dans la narration si cela n'apporte rien hormis l'impression d'une insertion militante superflue?

Je dois admettre que je n'ai pas compris les raisons d'un tel emballement chez les critiques littéraires... L'étrangeté du récit, ça oui je l'ai perçue...mais de poésie point.

Oui, il en est des livres comme des gens... et fort heureusement.

 

Le Jour du Roi, de Abdallah Taïa. Editions Seuil. 210 Pages. Prix de Flore 2010.

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Manou se livre
  • Passionnée de littérature et d'écriture, de romans, de poésie et de théâtre, mais pas seulement. Mes thèmes fétiches : l'exil, l'immigration, les femmes, les relations entre les êtres... Mon amour des mots est le vôtre ? Alors bienvenue dans mon monde !
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